À L’ORIGINE DE LA FONDATION
La création de la Fondation pour l'Amour de la Danse s'est tout naturellement imposée comme la manière la plus juste et la plus élégante pour un certain nombre de proches parents et amis, de garder vive la relation qui les unissait à la personnalité attachante de Marc Pidoux, brusquement disparu en 2006.
Marc vouait un amour tout particulier à la danse. Qu'elle soit classique, moderne ou contemporaine, elle l'a accompagné tout au long de son existence. Telle une bonne fée, elle l'a aidé à vivre, parfois aussi à survivre.
Soutenir cet art, dont on connaît la fragilité, la précarité et l'exigence, en en favorisant la création, la transmission et la diffusion, est le but premier de la Fondation pour l'Amour de la Danse.
Le 1er juin 2007, sous la présidence d'honneur d’Yvette Chauviré, Prima Ballerina Assoluta de l'Opéra de Paris, et du compositeur grec Mikis Theodorakis, la Fondation pour l'Amour de la Danse voyait le jour. Pendant plusieurs mois, les danseurs de SINOPIA Ensemble de Danse, suivis tout au long des répétitions par le photographe et cinéaste suisse Tristan Pfund, ont travaillé, sous la direction du chorégraphe Etienne Frey, à la création de Semeurs d'étoiles, une soirée de gala pour célébrer cet événement.
La Danse est l'un des plus anciens miroirs de l'être et l'accompagne patiemment depuis la nuit des temps afin qu'il révèle au grand jour et à lui-même, la beauté subtile, multiple, généreuse, contrastée et parfois contradictoire, de son intériorité, de ses sentiments et,surtout, de son humanité.
Art du vivant par excellence, voie royale menant à l'âme, à la connaissance de soi et de l'autre en devenant par la pratique physique concrète, constante et répétée, l'artisan de son propre corps, la danse reste à ce jour l'une des formes majeures d'expression de ce long cheminement vers le devenir, et le témoin privilégié de l'être en marche vers sa souveraineté de cœur, de corps, d'âme et d'esprit.
Préserver la richesse incontestable de cette complicité particulière, de cet art dont on connaît les exigences et les situations souvent fragiles et précaires qu'il rencontre, en favorisant la création chorégraphique, la transmission de ses différentes techniques et en contribuant au mieux à sa diffusion et à son rayonnement dans le monde sont les objectifs premiers de la Fondation pour l'Amour de la Danse.
« Venez près du bord », dit-il.
« Nous avons peur », répondirent-ils.
« Venez près du bord », dit-il.
Ils y sont venus.
Il les a poussés.
Et ils se sont envolés.
Guillaume Apollinaire
LE REGARD RÉALISTE DE LA FONDATION SUR LA DANSE…
AUX ORIGINES …
La danse est l'une des formes d'expression les plus essentielles à l'être humain.
Précédant vraisemblablement les premiers rudiments d'un langage verbal, elle lui a permis dès son origine de partager la part émotionnelle et subtile qu’il ne pouvait alors exprimer. Très certainement aussi, à établir et maintenir vives face à l’inconnu, aux dangers, à l’hostilité et aux mystères de son environnement, une appartenance et une solidarité de groupe. Suscitant rejet ou fascination selon les cultures et les civilisations, tantôt incarnation du mal, du péché originel ou, à l’opposé, de la plus pure messagère invoquant la bonté et la bénédiction des dieux, elle traverse, sacralisée ou bannie, le fil des époques et des pouvoirs qui se succèdent, pour finalement connaître un début de professionnalisation sous le règne de Louis XIV, qui ordonne par décret en 1661, la création de l'Académie Royale de Danse.
Très vite des règles se définissent et les exigences se complexifient. Alors que les critères de sélection ne cessent d'augmenter au cours de son histoire, de nombreux individus appelés par ce besoin intime de s’exprimer physiquement, sans pour autant correspondre aux normes et aux modes établies, se frayent un chemin et ouvrent de nouvelles voies. Intimement entrelacée au cheminement de la société et ses évolutions, qu’elle les précède, les suscite ou les suive, la danse avance, évolue, métisse, absorbe et redonne. L’apparition de la de la danse moderne, qui grâce à Loïe Fuller, Isadora Duncan, Rudolf Laban, Mary Wigman et beaucoup d’autres, révolutionne le cercle très fermé des professionnels de la danse à des dizaines d'individus porteurs d'un grand potentiel artistique en témoigne. Plus récemment, une nouvelle ère voit le jour dans les années 70, avec l'émergence d’un espace chorégraphique contemporain, véritable révolution des interprètes créateurs, conduisant au développement phénoménal d'une multitude d'écritures libérées des codes classiques et modernes alors en vogue.
À L'ÈRE DU VIRTUEL ...
Moyen intime d'expression de l'être, cet art premier permettant de devenir l'artisan de son propre corps, est plus que jamais violemment confronté aux incidences chaotiques d'un système de pensée unique basé sur la rentabilité, la productivité et la globalisation. Un système qui privilégie l'apparence au détriment de la connaissance, l’esthétique de l’image à la maîtrise des énergies. Son présent et son futur ne semblent plus dépendre de ses propres critères et exigences, mais du diktat des médias et des grandes puissances financières.
Aujourd’hui plus que jamais, l'image de corps ”sans personne dedans”, gonflés aux anabolisants, transformés chirurgicalement et parés des derniers atours à la mode, semble mieux répondre aux attentes de publicitaires et leur assurer des revenus plus rapides que celle de corps unis aux âmes et aux esprits qu'ils véhiculent ; des corps habités et formés de l'intérieur par l'intime, transcendés et aptes à réellement incarner un cheminement, une individualité et des possibles prometteurs pour la collectivité. Art du vivant par excellence, fruit d’une connaissance acquise par la pratique physique, constante et répétée, la danse est d'autant plus fragilisée que les jeunes générations, éduquées par le virtuel et soumises à un régime de surconsommation technologique, semblent de moins en moins structurées intérieurement et de plus en plus inaptes à l'effort pour réaliser leurs désirs.
Il est par ailleurs paradoxalement cocasse de constater que ce qui a été tant reproché à la danse classique, à savoir une sélection très rigoureuse et élitaire basée sur des critères physiques ne tenant ni compte des qualités essentielles de l'être ni de son besoin spontané et légitime de danser, est entièrement reproduit aujourd'hui dans des proportions démultipliées selon des critères d’apparence généralement faussés par des logiciels de retouche assistés par ordinateur, au service des publicitaires, des chaînes de télévision et de producteurs peu scrupuleux.
EN CONCLUSION
Ce regard critique nous montre qu'il faut beaucoup d'engagement aux grandes institutions culturelles des pays riches pour exercer des pressions et concurrencer les lois économiques en vigueur, et espérer qu’elles sauront toujours aller de l'avant et assurer la perpétuation de leur patrimoine artistique.
Il nous montre également qu’il n’en va pas de même partout dans le monde, surtout pas là où l'essor financier et le développement technologique n'ont pas connu pareille frénésie. C'est aujourd’hui souvent dans ces endroits défavorisés que de nombreux individus se révèlent être porteurs de talents et de potentiels extraordinaires pour servir l'art de la danse et créer - dans son sens étymologique de "sortir du chaos" - des visions, des conceptions et des réalités nouvelles. C'est là aussi que davantage d'individus ont encore une force intérieure intacte pouvant leur permettre de surmonter les difficultés et se jouer des efforts immenses que requiert l'apprentissage de la danse: des personnalités inclines à devenir artistes et à se réaliser dans la maîtrise d'une technique d'expression plutôt qu'à devenir stars d'un système, d'un jour ou d'un clip.
Forte de ce constat, la Fondation pour l'Amour de la Danse souhaite être active et solidaire auprès d'individus ou de collectivités réellement dans le besoin, l'urgence et le désir profond. Bien souvent, c'est individuellement qu'un tout petit détail peut faire une énorme différence et transformer profondément une collectivité.
OBJECTIFS
Dans de nombreux pays, l’accès à une formation professionnelle dans un domaine artistique est souvent très compliqué. Généralement, il existe peu ou pas du tout de structures institutionnelles ni d’aides attribuées aux métiers des arts vivants de la scène, et il est difficile pour les familles de trouver les fonds nécessaires à financer des études souvent longues et coûteuses. Dans les pays occidentaux, bien qu’il existe de nombreuses possibilités de trouver des formes d'aide et du soutien pour répondre aux aspirations des personnes souhaitant se lancer dans une carrière de danseur professionnel, se réaliser en tant que chorégraphe, monter une compagnie, créer des ballets ou simplement enseigner la danse, la concurrence est grande et les fonds limités. De plus un certain nombre de prérequis et de critères relèvent souvent d'une pratique et d’une organisation de la profession plus guère adaptée aux fonctionnements de la société actuelle.
Tout en encourageant la recherche de la qualité et de l'excellence, quête qui fait partie du chemin de tout être humain artiste ou non, la Fondation pour l'Amour de la danse a pour objectif de répondre, dans la mesure de ses moyens, à des situations particulières que peuvent rencontrer individuellement ou collectivement, des personnes ou des institutions, animées par la passion de la danse, sans restriction de style, d'origines, de nationalités ou de croyances religieuses ou politiques.
MODES DE FONCTIONNEMENT
La Fondation pour l'Amour de la Danse entend fonctionner de façon ponctuelle, mais se réserve le droit selon les cas, de poursuivre un soutien sur plusieurs années. Elle souhaite pallier avant tout les besoins premiers et indispensables permettant d'améliorer des conditions de travail ou de ne pas être amené à devoir interrompre une formation, une carrière ou un projet, faute de moyens financiers.
Elle souhaite également dans la mesure de ses moyens, de ses contacts et de ses réseaux, s'engager moralement auprès de ses futurs partenaires. À cette fin, elle s'entourera de conseillers et de personnes connaissant les situations et les besoins dans les différents endroits où ses objectifs et ses projets la porteront. Les différentes requêtes seront étudiées au cas par cas, en se basant essentiellement sur les motivations profondes exprimées par les demandeurs.
QUELQUES CAS DE FIGURE
En Afrique du Sud, à l'initiative de certains danseurs professionnels de la compagnie nationale de ballet, tous bénévoles, un centre de danse s'est ouvert dans des quartiers défavorisés d’une capitale. Il permet à des jeunes sans accès à une scolarité normale de pouvoir par l'apprentissage de la danse, commencer à se former et se sociabiliser. Une aide ponctuelle pourrait permettre l'acquisition d'un tapis de danse, de matériel sono ou de miroirs…
Un simple billet d'avion et deux nuitées d'hôtel peuvent permettre à un danseur extrêmement talentueux sans moyens financiers, de prendre part à un concours et recevoir une bourse, ou participer à une audition et trouver un engagement qui change radicalement sa destinée…
Un stage d'un mois à la Alvin Ailey Dance School de New York peut également changer le destin d’une merveilleuse jeune danseuse à la couleur de peau un peu trop hâlée pour faire carrière dans son propre pays, quand bien même son talent y est reconnu…
Dans certains pays où des jeunes ont plein de talent, une paire de chausson de pointe, un collant ou un body représente la valeur d'une semaine de travail des parents. Collecter et financer l’envoi de matériel peut faire la différence…